Sunday, November 05, 2006

Bahá'u'lláh


Quant à Bahá'u'lláh, il apparut à une époque où l'Empire persan était plongé dans l'obscurantisme et dans l'ignorance les plus grands, et perdu dans le fanatisme le plus aveugle.
Certes vous avez lu en détail, dans les histoires européennes, quel était l'état des pensées, des coutumes et des idées des Persans dans ces derniers siècles. II est inutile d'y revenir.
Nous dirons seulement que la Perse était tombée si bas que les voyageurs étrangers déploraient que ces provinces, si glorieuses autrefois, et si civilisées, faussent maintenant tellement abattues et ruinées, complètement renversées de leur base, et que ses populations faussent parvenues à une aussi complète dégradation.
C'est à cette époque que Bahá'u'lláh se manifesta. Son père était un des vizirs, non un des ulama : et tout le monde sait en Perse qu'il n'étudia dans aucune école, et qu'il ne fréquenta ni les ulama ni les savants.
Il débuta dans la vie au milieu du bonheur et de la félicité les plus complets, étant en rapport et en bonnes relations avec la haute société persane, mais non avec des savants.
Dès que le Bab annonça sa mission, il dit : "Cet homme glorieux est le Seigneur des justes, et à tous s'imposent la foi et la certitude !"
Et il se leva pour seconder le Bab, et donner en témoignage des preuves et des arguments péremptoires sur la vérité de sa cause, bien que les ulama de la religion eussent contraint le gouvernement persan à l'opposition et à la résistance les plus grandes, et qu'ils eussent rendu des fatvas ordonnant le meurtre, le pillage, la persécution, l'expulsion et l'écrasement des babis.
Dans toutes les provinces on se mit à tuer, à incendier, à piller et à violenter jusqu'aux femmes et enfants. Malgré cela, Bahá'u'lláh, avec l'énergie et la fermeté les plus grandes, se leva pour proclamer la parole du Bab.
Jamais il ne se cacha une seule heure : clairement, ouvertement, il se mêlait à ses ennemis, occupé à établir des preuves et des arguments.
Il fut reconnu comme le héraut de la parole de Dieu. En beaucoup de circonstances et d'occasions, il endura de violentes calamités, et à chaque minute il faillit devenir un martyr; on alla jusqu'à l'enchaîner et l'emprisonner dans un souterrain.
Toutes ses vastes propriétés, ses héritages furent confisqués et pillés.
De pays en pays, il fut exilé quatre fois, et il ne trouva de repos que dans la Prison suprême.
Malgré cela, il ne cessa pas un instant de proclamer et de célébrer la cause de Dieu, et il se manifesta avec des vertus, un savoir, des perfections qui furent la cause de l'admiration de tous les peuples de la Perse.
Au point que, à Tihran, à Baghdad, à Constantinople, en Roumélie et à Saint-Jean-d'Acre, tous ceux qui, parmi les gens instruits et les savants, parvenaient en sa présence, amis ou ennemis, et qui lui posaient une question, recevaient une réponse convaincante et suffisante.
Et chacun, à maintes reprises, reconnut que cet être était seul et unique dans le monde pour ses perfections.
A Baghdad, il arriva souvent que, dans la réunion bénie, des ulama ä de l'islam, des juifs et des chrétiens, se trouvaient assemblés avec des savants européens. Chacun posait une question; et quoique ces hommes eussent chacun une culture différente, ils recevaient des réponses convaincantes et suffisantes, et ils s'en retiraient satisfaits.
C'est au point que les ulama persans qui étaient à Karbila et à Najaf choisirent un savant qu'ils chargèrent d'une mission auprès de lui : il s'appelait Mulla Hasan-i-Ammu. Il vint en la présence sacrée, et posa, de la part des ulama, un certain nombre de questions auxquelles Bahá'u'lláh répondit.
Puis Hasan-i-Ammú dit : "Les ulama reconnaissent sans hésitation et confessent la science et l'excellence de votre personne; et il est certain pour tous qu'elle n'a pas d'égale ni de semblable dans toutes les sciences.
Et il est aussi reconnu que vous n'avez jamais étudié ni travaillé ces sciences. Mais les ulama disent qu'ils ne se contentent pas de cela, et qu'ils ne confessent ni ne reconnaissent la vérité de votre mission, d'après votre savoir et votre excellence. Aussi nous vous demandons de faire apparaître un miracle, pour contenter et tranquilliser nos coeurs."
Bahá'u'lláh répondit : "Bien que vous n'en ayez nullement le droit (car c'est à Dieu qu'il appartient de mettre la créature à l'épreuve, et non à celle-ci d'éprouver Dieu), malgré cela, cette demande est agréée et approuvée.
Mais la cause de Dieu n'est pas un théâtre, où l'on représente à chaque heure un spectacle, et où chaque jour on demande quelque chose. Autrement elle deviendrait un jeu d'enfants.
Les ulama doivent donc s'assembler et, d'un commun accord, choisir un miracle, puis écrire qu'après l'apparition de ce miracle ils n'auront plus de doutes sur moi, et que tous reconnaîtront et confesseront la vérité de cette cause. Qu'ils cachettent cette feuille de papier et me l'apportent;
que ceci soit leur critérium. Si le miracle apparaît, il ne restera pour vous aucun doute, sinon, nous serons convaincu d'imposture." Le savant personnage se leva et dit : "Il n'y a plus rien à dire." Il baisa le genou de Bahá'u'lláh, bien qu'il ne fût pas un croyant, et il s'en alla.
Il réunit les ulama et leur transmit le message sacré. Ceux-ci se concertèrent, puis dirent :"Cet homme est un enchanteur, peut-être va-t-il accomplir quelque enchantement, et alors nous n'aurons plus rien à dire." Et ils n'osèrent pas pousser plus loin.
Quant à Hasan-i-Ammú, il parla de cette aventure dans la plupart des réunions; il quitta Karbila pour Kirmanshah et Tihran, et raconta les détails partout, parlant de la crainte des ' ulama et de leur retraite.
Ainsi tous ses adversaires, en Orient, reconnaissaient la grandeur, la noblesse, la science, l'excellence de la Beauté Bénie et, bien qu'ils fussent ses ennemis, ils parlaient toujours de lui comme du "célèbre Bahá'u'lláh".
Bref, cet Astre sublime se leva soudain à l'horizon de la Perse, alors que ses habitants, ministres, ulama, peuple, s'étaient dressés contre lui avec la plus grande animosité, en disant qu'il voulait supprimer et détruire la religion, la loi, la nation, l'empire. De même avait-on parlé contre le Christ.
Cependant Bahá'u'lláh, seul et sans appui, résista à tout le monde, sans jamais montrer la moindre défaillance. A la fin, on dit : "Tant que cet homme sera en Perse, il n'y aura ni tranquillité ni repos. Il faut donc l'exiler, afin que la Perse recouvre la paix."
On força Bahá'u'lláh à demander la permission de sortir de la Perse, pensant qu'ainsi la lampe de la cause sacrée s'éteindrait. Mais, au contraire, il n'en résulta que des choses heureuses : la cause grandit, et sa flamme devint plus brillante. D'abord, elle s'était répandue dans la Perse seule; mais ce fut la raison qui la fit se répandre dans d'autres contrées.
Alors on trouva que l'Iraq Arabi, était près de la Perse et qu'il fallait l'exiler dans des provinces lointaines. Aussi le gouvernement persan fit-il des démarches pour qu'on envoyât Bahá'u'lláh de l'Iraq à Constantinople.
Puis, on vit que la cause n'avait jamais eu un moment de défaillance. On trouva alors que Constantinople était un lieu de passage et de séjour de peuples et de races sans nombre, où vivaient beaucoup de Persans; c'est pourquoi les Persans s'efforcèrent de faire exiler Bahá'u'lláh en Roumélie.
Mais la flamme devint plus brillante, la cause plus grande. A la fin, les Persans dirent : "Aucune de ces places n'est digne de confiance ni sûre; il faut l'envoyer quelque part où il sera réduit à l'impuissance, dans un lieu de trouble et de misère, où sa famille et ses compagnons éprouveront de grands malheurs."
Donc ils choisirent la prison de Saint-Jean-d'Acre, qui est réservée aux meurtriers, aux voleurs et aux brigands de grands chemins. Et, en vérité, ils le mêlèrent à ces hommes.
Mais la puissance divine se manifesta, car cette prison fut la cause de la promulgation et de la proclamation de sa parole.
La grandeur de Bahá'u'lláh devint évidente, car c'est de cette prison, et dans des circonstances aussi humiliantes, qu'il fit avancer la Perse d'une condition à une autre, qu'il soumit tous ses ennemis, et leur prouva qu'ils ne pouvaient résister à cette cause.
Ses enseignements sacrés pénétrèrent toutes les régions, sa cause fut établie. Oui, dans toute la Perse, ses ennemis agissaient avec la plus grande haine, emprisonnant, tuant, frappant, incendiant, et ruinant de fond en comble des milliers de demeures, s'efforçant par tous les moyens d'exterminer et d'écraser la cause.
Malgré cela, de la prison des meurtriers, des brigands de grands chemins et des voleurs, il fit triompher sa cause et répandit ses enseignements; il exhorta la plupart de ceux qui avaient été les plus enragés contre lui et en fit des croyants; au point que le gouvernement persan lui-même s'éveilla, et fut honteux du mal qui était arrivé par la faute des ulama.
Lorsque Bahá'u'lláh arriva dans cette prison, en Terre sainte, les gens instruits comprirent que la bonne nouvelle que Dieu, par la bouche des prophètes, avait donnée deux ou trois mille ans auparavant, était réalisée, que Dieu était fidèle à la promesse.
Car à plusieurs des prophètes il avait révélé et donné la bonne nouvelle qui a trait à la Terre sainte : "Le Seigneur des armées doit se manifester chez toi."
Toutes ces promesses étaient accomplies! Et s'il n'y avait pas eu ces persécutions, ces exils et ces bannissements, de la part des ennemis, on ne pourrait comprendre pourquoi Bahá'u'lláh aurait dû s'enfuir de Perse, et planter sa tente en Terre sainte.
Les ennemis voulaient, par cet emprisonnement, anéantir et détruire complètement la cause sacrée; au lieu de cela, cette prison bénie fut l'aide suprême, et le moyen de son développement.
Sa voix divine parvint à l'Orient et à l'Occident, et les rayons du Soleil de Vérité brillèrent à tous les horizons.
Gloire à Dieu! Bien qu'il fût emprisonné, sa tente était dressée sur le mont Carmel, et il circulait avec la plus grande majesté! Et tous ceux, amis ou étrangers, qui furent honorés de sa présence, disaient : "C'est un prince, non un prisonnier !"
A son arrivée dans la prison, il écrivit une adresse à Napoléon III, qu'il envoya par l'entremise de l'ambassadeur de France, et dans laquelle il disait : "Demandez quel fut notre crime, et pourquoi cette prison et ce cachot." Napoléon ne répondit pas.
Une seconde épître fut rédigée peu après son arrivée à 'Akka, qui est contenue dans la Súriy-i-Haykal et où il est écrit : "Napoléon, comme tu n'as pas écouté la proclamation, et comme tu n'as pas répondu, bientôt ton empire disparaîtra, et tu seras entièrement ruiné."
Cette épître faut envoyée par la poste aux soins de César Catafago, à la connaissance de tous les compagnons d'exil.
La copie de cette épître se répandit rapidement dans toute la Perse, car le Kitab-i-Haykal y était alors partout distribué, et cette lettre se trouve comprise parmi les documents de ce livre. Cela se passait en l'an 1869 de l'ère chrétienne. Et comme la Súriy-i-Hykal était aussi distribuée dans l'Hindoustan, elle se trouvait dans les mains des croyants, et tous attendaient avec confiance l'accomplissement de cette prophétie.
Peu de temps après, en 1870 de l'ère chrétienne, le feu de la guerre éclata entre l'Allemagne et la France. Et, bien que personne ne crût à la victoire de l'Allemagne, Napoléon faut battu; il but la honte, il se rendit à l'ennemi et sa gloire faut changée en humiliation suprême.
De même, des tablettes furent envoyées aux autres rois, parmi lesquelles la lettre à S. M. Nasiri'd-Din Shah, dans laquelle il dit : "Fais-moi appeler, réunis tous les ulama, et demande des preuves et des arguments, afin que la vérité et le mensonge apparaissent."
S. M. Nasiri'd-Din Shah envoya l'épître sacrée aux ulama, et leur proposa d'accepter. Mais ils n'osèrent pas. Alors il demanda à sept des plus célèbres d'entre eux d'écrire une réponse à cette lettre; après quelque temps, ils rendirent la lettre sacrée, disant que cet homme était un adversaire de la religion et un ennemi du shah.
S. M. le shah de Perse faut très mécontent, parce que cette affaire étant une question de preuves et d'arguments, de vérité ou d'apostasie, comment pouvait-il s'agir d'inimitié envers le gouvernement ?
"Hélas, dit-il, combien nous avons eu d'égards pour ces ulama, qui ne peuvent même pas répondre à cette lettre!"
Bref, tout ce qui est rapporté dans les tablettes aux souverains s'est ensuite réalisé. Si, depuis 1870, on examine les événement, on voit que tout s'est passé comme il était prédit, et qu'il en reste très peu à apparaître encore.
C'est ainsi que les peuples étrangers et les sectes non croyantes attribuèrent à Bahá'u'lláh beaucoup de choses extraordinaires.
Certains, le regardant comme un saint, firent des ouvrages sur lui : parmi eux, siyyid Daoudi, un savant sunnite de Baghdad, a écrit une courte plaquette dans laquelle il raconte certains actes surnaturels de Bahá'u'lláh.
Maintenant encore, partout en Orient, il y a des gens qui, tout en ne croyant pas à sa manifestation, croient néanmoins qu'il faut un saint, et racontent des miracles qui lui sont attribués.
En résumé, tant ses adversaires que ses partisans, tous ceux qui furent reçus dans le lieu sacré, reconnurent et confessèrent la grandeur de Bahá'u'lláh.
Si, en fin de compte, on ne croyait pas en lui, on reconnaissait sa grandeur dès qu'on parvenait dans le lieu sacré.
La rencontre de Bahá'u'lláh produisait de tels effets que la plupart des gens ne pouvaient parler.
Combien de fois arriva-t-il qu'un de ses plus terribles ennemis prit en lui-même la résolution et l'engagement de dire telle et telle chose en arrivant en sa présence, et d'amener telle controverse et telle discussion; mais dès qu'il arrivait au lieu sacré, il demeurait stupide et confondu, et n'avait d'autre ressource que de rester silencieux et tranquille.
Bahá'u'lláh n'avait pas étudié l'arabe, il n'avait eu ni professeur ni maître, et il n'avait été dans aucune école :néanmoins, l'éloquence et l'excellence de ses discours bénis, en arabe, aussi bien que de ses tablettes arabes, ont causé l'étonnement et la stupéfaction des lettrés les plus accomplis en cette langue; tous reconnaissent et avouent qu'il est incomparable et sans pareil,
Et si nous examinons avec soin le texte de la Bible, nous voyons qu'aucune des manifestations divines ne dit à ceux qui les reniaient : "Tous les miracles que vous demanderez, je suis prêt à les accomplir, tout critérium que vous choisirez, je l'accepte."
Pourtant, dans l'épître au shah, il proclama clairement : "Réunis les ulama, et demande-moi les preuves et les arguments que tu voudras que j'établisse".
Pendant cinquante ans, Bahá'u'lláh se tint en face de ses ennemis comme une montagne : tous voulaient l'anéantir et cherchaient sa perte. Mille fois on tenta de le crucifier et de, le détruire; et pendant ces cinquante ans, il fut constamment dans le plus grand danger.
La Perse, aujourd'hui, est dans un tel état de décadence et de ruine que tous les hommes intelligents, au courant de la véritable situation, reconnaissent que son progrès, sa civilisation et son relèvement dépendent de la promulgation des enseignements et du développement des principes de ce grand personnage.
Le Christ, en son temps béni, a réellement éduqué onze hommes dont le plus célèbre était Pierre : néanmoins, quand ce dernier fut mis à l'épreuve, il renia trois fois le Christ. Malgré cela, combien, par la suite, le christianisme a pénétré les fondations du monde!
Aujourd'hui, Bahá'u'lláh a éduqué des milliers d'humains qui, sous la menace de l'épée, poussent au plus haut des cieux le cri Ya-Bahá'u'l-Abha et dont, sous le feu des épreuves, le visage brille comme de l'or! Puis songez à ce qui se passera encore dans l'avenir!
En résumé, il faut reconnaître avec équité quel éducateur de l'humanité fut cet être glorieux, quels signes merveilleux il manifesta, et quelle force et quelle puissance ont émané de lui dans le monde de l'existence !

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